« L’armée n’a rien fait pour protéger la population »

Suite à deux nouvelles incursions, pendant les nuits de vendredi 12 à samedi 13 juin et de samedi 13 à ce dimanche 14, quatre civils, ont été abattus à Kekelibo, dans la banlieue d’Oïcha, chef-lieu du territoire de Beni, dans l’Est de la république démocratique du Congo (RDC), et six au village Mukondi, sur l’axe routier Eringeti-Kaïnama, dans le même territoire.

14/06/2020

Responsables des attaques seraient, selon le gouvernement, les hommes de l’Alliance des forces démocratiques (ADF). Une version officielle qui se heurte à une réalité bien plus complexe, dans laquelle la population et certains élus voient la main de l’armée (FARDC), dont on regrette, encore une fois, la non-intervention.

Philippe Bonané, président des ‘forces vives’ de la commune rurale d’Oicha, a déclaré que : « Les personnes tuées à Kekelibo étaient enlevées par les assaillants à Kitevya. C’est depuis 15 heures locales que les alertes étaient déjà données par la population. Malheureusement, l’armée n’a rien fait pour protéger la population ».

A Beni, on aligne sans cesse les cercueils

Action psychologique et manipulation des consciences

La recrudescence des assauts criminels ne change pas d’un iota la ligne de communication de l’armée. Son porte-parole, le lieutenant Antony Mualushayu, a affirmé hier que tous les bastions des « présumés ADF » ont été conquis… Et « c’est pour cela qu’ils essaient de réagir pour les reprendre, en nous donnant du fil à retordre »,  ajoute le général Ychaligonza, patron des FARDC à Beni.  Alors que le nombre des victimes augmente : 702 depuis le 31 octobre, dont 44 en juin, les autorités militaires font quotidiennement état de « rebelles » tués, de redditions de groupes armés, de caches d’armes découvertes. De l’information ou de l’action psychologique pour manipuler les consciences ?

En novembre dernier, tout au début des Opérations de grande envergure qui auraient dû mettre fin aux atrocités, un fils du terroir, le général Evariste Somo Kakule,  a été chargé une d’une toute nouvelle fonction au sein des FARDC : « la sensibilisation des populations aux opérations militaires », autrement dit, « le mariage des Beniciens avec l’armée »… qui tue leurs propres fils…

Les faits sont têtus

Mais les faits sont têtus et les constats sur les responsabilités de la grande muette dans les violences au Nord-Kivu sont innombrables. Dans son dernier rapport, le Groupe d’experts de l’ONU note la violation de l’embargo sur les armes par les FARDC. Il indique que des armes de fabrication iranienne livrées aux FARDC ont été utilisées contre une patrouille de la MONUSCO en juillet 2019 à Beni. « Les unités des FARDC et leurs chefs sont les plus grands pourvoyeurs d’armes et de munitions aux groupes armés qui écument l’est de la RDC. Il sera difficile de pacifier cette partie du pays avec les mêmes acteurs militaires spécieux », commente un expert militaire du site DESC.

A Beni sonne l’heure de la vérité et, si les noms des officiers qui trempent dans les crimes circulent depuis belle lurette, ceux des civils qui les soutiennent ne sont pas inconnus non plus. Selon un député de Lubero, l’honorable Kambale Lusenge Bonane, l’ancienne ministre du genre, Geneviève Inagosi, aurait communiqué à Jeanine Mabunda, présidente de l’Assemblée nationale, des informations concernant des hommes politiques de Beni qui seraient liés aux réseaux meurtriers.

Des rebondissements sont attendus…

Luigi Elongui


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